Poste d'octroi

Le concierge, tiens parlons en du concierge. 

La porte de sa loge est constamment ouverte, lui toujours aux aguets surveillant les allées et venues, cherchant à attirer vers lui les conversations, les confessions, les ragots. 

Quand je rentre dans la résidence, il me semble que l'immeuble est gardé par un employé de l'octroi, chargé de recouvrir non pas des impôts mais des amabilités et des menus propos. 

Le passage n'est pas libre, il me faut franchir un poste de péage que je paye par des mots. 

Parfois, le concierge discute avec des locataires par l'ouverture de sa fenêtre, cet homme est sympathique mais là n'est pas la question. 

Je me sens pris en tenaille entre sa volubilité expansive et la froideur automatique de la porte d'entrée, qui, lorsque actionnée par le vigik, proclame haut et fort de sa voix synthétique "vous pouvez entrer" (la furtivité est impossible). 

Entre l'humain et la machine, dans ce cas là je ne préfère rien; je voudrais pouvoir rentrer chez moi par un tunnel ou en claquant des doigts. 

Échapper à la validation électronique prouvant que je vis bien dans cet immeuble. 

Échapper à la validation sociale confirmant que je fais partie de cette communauté humaine.