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Une âme effarouchée
11 août 2017

Yvan

Les poils formaient des amas compacts sur ses épaules et le haut de ses bras, tels des moutons de poussières oubliés sous un lit crasseux.
Il était devenu si accro à une substance prohibée que seul le retour (très sporadique) à la réalité pouvait encore lui offrir une sensation de défonce.
Au début, il voulait tâter de cette drogue afin de pouvoir embrasser l'univers tout entier (et plus si affinités).
Rapidement, comme tous les junkies, il ne se droguait plus pour être bien mais pour cesser d'être mal.
Ses muscles avaient logiquement fondu puisqu'il passait son temps allongé.
"Comme un romain" pensait-il parfois, mais en réalité plutôt comme un mort.
Ses os s'étaient tassés et il avait acquis la stature d'un cacochyme scolopendre.
La forêt mitoyenne à son quartier était connue pour les cris stridents des geais et des gays, les premiers en haut des arbres, les autres dans les fourrés.
Il considérait autrui comme un passe-temps, une façon d'accélérer la danse du jour qui, sinon, se trainait lamentablement.
Il avait une sainte horreur de la solitude et du silence, qui lui laissaient penser qu'il était déjà mort.
Sans agitation ni décibels autour de lui, il pouvait clairement discerner les mots que lui sussurait son angoisse au creux de l'oreille.
Alors, il réclamait de la compagnie à grands cris, comme le bébé exige son hochet pour ne pas s'ennuyer.
Et puis, en liant des amitiés, il s'assurait de la présence d'une assistance minimale à son enterrement, c'était important de ne pas crever seul dans son coin, pensait-il.
La vie lui apparaissait comme un cadeau bonus d'une lessive qu'il n'avait pas achetée.

 

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