Dans l'obscurité, tout est imaginable

Un jour, ça devait être en avril, on marchait en ville, je lui ai demandé pourquoi il croyait en Dieu, ce que ça pouvait bien lui apporter. Je ne comprenais pas.

Il entrait souvent dans les églises devant lesquelles ses pas le menaient, volontairement ou par l'effet du hasard de sa marche.

Il n'était pourtant pas catholique, ni même chrétien, il se définissait seulement comme croyant.

Il a répondu longuement à mon interrogation.

"Tu me demandes l'intérêt de croire en Dieu ?

C'est l'espace de liberté immense qu'Il m'offre pour tenter de le définir.

Dans l'obscurité, tout est imaginable.

En l'absence de Dieu dans le monde, toute latitude  nous est offerte pour le concevoir - le créer - dans notre esprit, selon nos souhaits, besoins ou envies.

Pour pouvoir penser l'univers, le cosmos, il faut tenir compte des connaissances que la science en a, selon l'époque où l'on vit , il faut raisonner en termes de relativité, de big bang, d'expansion. "

Il s'est épongé, le thème de son discours lui donnait chaud, le soleil brillait fortement et l'ombre était absente de notre parcours.

Il a repris :

"Alors que pour réfléchir à Dieu, qui entoure l'univers, qui le contient, Dieu qui est le temps, le hasard, le tout et le vide, pas de nécessité de rationalité.

Le divin doit être conçu individuellement par chacun de ses croyants; les religions n'étant qu'un mode d'emploi offrant une croyance prête à penser aux fainéants ou à ceux qui aiment aggréger leur foi à celle de la majorité pour vénérer non pas Dieu mais leur appartenance au troupeau rassemblé."

J'écoutais son laïus, j'avais assez hâte qu'il se termine car je commençais à avoir vraiment faim; d'une part parce que je n'avais pas petit déjeuner ce matin là, d'autre part parce que l'été se déclarait bien en avance sur le calendrier et que les tenues légères des passantes autour de nous laissaient entrevoir de larges pans de chairs moelleuses et appétissantes.